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Fort Simpson : impatience chez les sinistrés

Dernière mise à jour : 20 juil. 2021

« Les résidents viennent d’être inondés. Pas besoin de leur arracher des dents en plus. » — Sean Whelly, maire de Fort Simpson

Texte et photos de Marie-Soleil Desautels

Le maire de Fort Simpson, Sean Whelly, et plusieurs sinistrés des inondations du printemps s’impatientent face à la lenteur de la réponse gouvernementale. La collectivité de la Première Nation de LíídlĮĮ Kųę, située au confluent du fleuve Mackenzie et de la rivière Liard, a été l’une des plus fortement touchées le long du fleuve : 70 maisons privées ont été endommagées dont 10 au point d’être irréparables, selon les dernières estimations. Le village a été évacué au complet le 9 mai dernier.

Moins d’une demande sur trois permettant d’obtenir du « financement immédiat » allant jusqu’à 10 000 $, déposée en vertu du Programme d’avances d’urgence en cas de sinistre annoncé le 14 juin, a été approuvée jusqu’à présent. « Quatre résidents de Fort Simpson ont reçu de l’argent et 10 autres cas sont à l’étude », affirme le conseiller en communications aux Affaires municipales et communautaires du gouvernement, Jay Boast.

« Avec la bureaucratie et les formulaires, tout est si complexe, affirme le maire. Les résidents viennent d’être inondés. Les couts, tant financier qu’émotionnel, sont énormes. Pas besoin de leur arracher des dents en plus ! » Il donne en exemple la Prestation canadienne d’urgence mise en place durant la COVID, où un minimum d’information suffisait pour l’obtenir. Une quinzaine de personnes sont encore hébergées dans huit chambres d’hôtel, rappelle-t-il.

Fin juin, le gouvernement territorial a annoncé qu’il assumera tous les couts pour réparer les domiciles, qu’il élèvera des maisons, qu’il remplacera des résidences irréparables et qu’il couvrira des articles endommagés jusqu’à une indemnité maximale pouvant atteindre 80 % ou 100 000 $. Mais les citoyens restent avec plein de questions et vivent un stress important, a pu constater Médias ténois, même après la visite du 29 juin de la première ministre Caroline Cochrane et de ses ministres à Fort Simpson et Jean Marie River. Le ministère des Affaires municipales et communautaires prévoyait terminer cette semaine des évaluations structurelles supplémentaires.


Allison DePelham : « Mortellement lent »

Allison DePelham parvenait à rester calme lors des inondations : ses assurances devaient couvrir ce désastre naturel. Du moins, c’est ce qu’elle croyait. « Quand j’ai téléphoné, ils m’ont dit que cette couverture était suspendue après un an et non renouvelée à moins que le client le demande. J’étais estomaquée! », dit-elle. Le futur de sa maison se retrouve ainsi entre les mains du gouvernement. « Des personnes ont dit que c’était réparable, d’autres pas. J’ignore ce qui m’attend ». Le sous-sol abritait un 2 et demi et sa fille y habitait. Elle a dû déménager. Allison vit au rez-de-chaussée, non touché. Optimiste, elle relativise : « On est au Canada. On va finir par avoir de l’aide. Mais l’hiver s’en vient et, jusqu’à présent, le gouvernement a été mortellement lent. »


Kelly Pennycook : « Ça nous cause un stress extrême »

Kelly Pennycook est inquiet pour ses enfants, âgés de 13 et 16 ans. « Se- lon l’évaluation du MACA, il y aurait pour 40 000 $ de dommages dans ma maison, dit-il. On a perdu beaucoup de biens. Mais le pire, c’est à quel point ça bouleverse nos vies et nous cause un stress extrême. » La famille a perdu son toit il y a plus de 65 jours. Elle est hébergée au motel Maroda où ils « doivent cuisiner pour une famille de quatre dans un microonde ». Kelly a fait une demande pour obtenir le fond d’urgence de 10 000 $. « Je rem- plissais tous les critères, ça disait que j’aurais de l’argent en cinq jours. Mais ils ont changé la procédure et ajouté des conditions ou demandent d’autres informations », dit-il. Il n’a toujours rien reçu. Il ne comprend pas pourquoi tout est aussi compliqué.


Mark Gerlock : « On dirait qu’on va devoir se battre »

Le matin de notre visite, Mark Gerlock a reçu un coup de fil « très blessant » du gouvernement : « On nous a dit qu’on ne nous aiderait pas parce qu’on avait une assurance, mais la nôtre ne couvre pas la reconstruction. On a déjà dépensé beaucoup ! » Lui et sa conjointe sont retraités et les revenus sont limités. Si l’inondation n’a pas abimé le rez-de-chaussée, leur sous-sol aménagé a été massacré. Il a mis près de 300 heures à démolir, nettoyer, désinfecter. Il a rempli des demandes d’indemnisation restées sans réponse. Quant aux possibilités d’élever ou de relocaliser des maisons, il ne comprend pas si ça le touchera ou comment sa maison, avec un sous-sol, pourrait être soulevée alors qu’il y avait presque 1,5 mètre d’eau devant sa porte d’entrée. « La communication avec le gouvernement est tout sauf claire. Mais on dirait qu’on va devoir se battre. »

Carl Gaule : « On m’a dit que j’allais recevoir de l’aide bientôt »

« J’avais presque terminé de rénover mon sous- sol. Je n’aurais pu imaginer un tel désastre », dit Carl Gaule. Des photos du contenu de sa maison empilé sur le trottoir ont fait le tour du Canada. Sa demeure, sous le nom de ses parents, n’était pas assurée. Il a éventré les murs, nettoyé et tout payé de sa poche : location de déshumidificateurs, électricien pour connecter son sous-sol, etc. Fin mai, il a rempli un formulaire du gouvernement qui promet une indemnisation jusqu’à 100 000 $ : « On m’a dit que j’allais recevoir de l’aide bien- tôt ». Toujours aucune nouvelle. Le maire de la ville, Sean Whelly, présent lors de l’entretien, lui demande alors s’il a rempli l’autre formulaire, celui où il faut lister les articles endommagés. Carl répond n’en avoir jamais entendu parler. « L’information ne circule pas jusqu’aux sinis- trés », se désole le maire.


Ernest Cazon : « Coincés ici »

« Ça fait deux mois qu’on est coincés ici », dit Ernest Cazon. Lui et cinq membres de sa famille sont logés dans deux chambres du motel Maroda. On entend la frustration dans sa voix. « Mais qu’est-ce que le gouvernement fout ? Ça leur coute quelque 200 $ par jour pour louer chaque chambre d’hôtel et on se compte chanceux, car on a une kitchenette, dit-il. Pourquoi ne nous donnent-ils pas de l’argent pour avancer les travaux? » Il croit qu’il ne pourra pas rentrer chez lui avant la mi-septembre. Il a appliqué pour obtenir les 10 000 $ afin de payer quelqu’un pour installer la fournaise et son chauffe-eau avant l’hiver. « Ma demande est en suspens. Il ne réalise pas l’impact de l’attente sur les sinistrés. »




Adolphus Augier : « Trop de trouble »

Avant que le fleuve Mac- kenzie ne déborde, Adolphus Augier, 66 ans, a vissé des crochets dans le plafond du rez-de-chaussée et a monté la plupart de ses biens au deuxième étage de sa mai- son, qui n’a pas de sous-sol. « J’ai suspendu mon lit et mes fauteuils, car ils sont trop lourds. Je n’ai rien perdu », dit celui qui les a décrochés récemment. Quelque 20 cm d’eau ont recouvert le rez-de- chaussée. Des entrepreneurs engagés par le gouvernement ont nettoyé son domicile. Il vit depuis des semaines dans un motel en attendant que soient remplacés sa fournaise, son réservoir à eau chaude et son plancher. Le maire Sean Whelly, présent lors de l’entretien, l’incite à réclamer le cout de l’hélicoptère et des 1400 km en voiture qu’il a payé de sa poche pour s’éva- cuer. « C’est trop de trouble », répond Adolphus.


Robert Norwegian : « Heureusement que je suis à l’aise financièrement »

Robert Norwegian a été chan- ceux dans sa malchance : il y a eu un refoulement d’égout avant que sa maison soit inondée. Résul- tat : ses assurances personnelles couvrent les couts qui, autrement, ne l’auraient pas été. Son garage, seulement inondé, n’a par contre pas été couvert. Or, puisque celui-ci sert pour ses entreprises en électricité et tourisme et qu’il y entreposait notamment oscilloscope, disjoncteurs, outils, pompes, quads et vilebrequins à glace, il a soumis, il y a quelques semaines, des demandes d’in- demnisation au gouvernement. Depuis, il attend. Il remplace ce dont il a besoin et garde les fac- tures. « Heureusement que je suisà l’aise financièrement », dit-il.

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