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Une pièce sur les mines contaminées pour inviter à la réflexion

La dramaturge Marie-Ève Fontaine vient de remporter le prix national RBC – Artiste émergente de l’année, délivrée par L’Association des théâtres francophones du Canada pour son projet de théâtre sur la mine Giant.


La pièce ne se concentrera pas exclusivement sur la mine Giant. Une part significative de la recherche est réalisée sur les cas des contaminations minières à Sudbury (photo), en Ontario, et à Rouyn-Noranda, au Québec. (Crédit photo : Jonathan Lorange)


Le projet est une production de sa compagnie 2359 qu’elle a démarrée avec Guillaume Saindon.


La pièce, encore en conception, se veut une réflexion autour des sites miniers contaminés. Marie-Ève est satisfaite de cette distinction. « Ça confirme que le sujet est très intéressant et que ça vaut la peine d’être exploré », avance l’artiste. Une bourse de 10 000 $ vient également avec le prix. « Ça me permet vraiment de me concentrer », assure-t-elle, avant d’ajouter que « les artistes n’ont pas toujours les ressources pour aller au bout des choses, alors, là, c’est vraiment un bon coup de pouce. »


Le mandat de sa compagnie 2359 est « d’aborder des enjeux d’envergure en utilisant une approche documentaire », et le sujet des sites miniers contaminés semble approprié. Pour l’instant, tout est encore en phase de recherche, avec des entrevues effectuées avec des personnes politiques, des scientifiques, des activistes ou encore des citoyens engagés. « On essaie vraiment de parler avec une variété de personnes qui peuvent nous donner de différents points de vue sur leur environnement, sur les problématiques minières », explique Marie-Ève.


L’artiste, qui a déjà reçu d’autres prix et mentions dans le monde du théâtre francophone au Canada, transcrit plusieurs entrevues et filtre les informations pour, à partir de là, trouver des solutions créatives pour raconter une histoire. Le processus peut alors s’avérer être un véritable défi. « Il y a tellement de portes à ouvrir et de pistes à explorer, poursuit la comédienne, mais à un moment donné il faut quand même faire une sélection dans ce processus-ci. »

Une prise de conscience collective

Marie-Ève Fontaine a grandi à Winnipeg et habite présentement à Ottawa. Elle avoue que, pendant longtemps, elle n’avait pas conscience de la réalité minière. « Ce n’est pas exactement une industrie présente dans les environs des endroits où j’ai habité », avoue-t-elle. Cependant un jour, lors d’un voyage à Yellowknife, quelqu’un lui a fait ouvrir les yeux sur l’existence des mines contaminées. C’était à ce moment-là qu’elle a commencé à s’interroger sur les répercussions écologiques des mines, et à se poser des questions sur « toute cette histoire avec la mine Giant et les 237 000?tonnes de trioxyde de diarsenic, et une consultation qui a duré dix ou quinze ans avant de trouver une solution ». L’artiste se pose alors la question : « Est-ce que, comme société, on est satisfait de ça ? »


L’artiste a conscience que c’est un sujet vaste et complexe. « Il y a plein d’histoires là-dedans qu’il faut qu’on raconte pour peut-être changer notre approche, notre comportement, notre relation avec la terre », commente-t-elle. Cependant, elle confie également que « ce n’est pas du tout un projet qui se veut antimine ». Marie-Ève explique pourquoi : « Je trouve trop facile d’être antimine dans le sens ou je parle avec un téléphone qui contient des ingrédients qui ont été minés dans la terre [comme] mon ordinateur, ou tout ce qui est autour de moi… plein d’objets. Alors on ne peut pas être simplement antimine. » Selon l’artiste, la pièce de théâtre cherche surtout à « ouvrir les yeux », à ceux qui ne connaissent pas le sujet et déclencher une invitation à la réflexion sur le comportement de l’être humain sur la planète.

Marie-Ève Fontaine (Courtoisie M.-E.F)


« Je pense beaucoup à des communautés comme les Dénés, à Yellowknife, qui ont subi des contrecoups énormes de ce territoire qui a été défiguré, commente la comédienne. Puis je voulais aussi aborder plus grand que la mine Giant, et cette recherche m’a permis de comprendre à quel point c’est un enjeu présent dans tellement de territoires. » Marie-Ève évoque également l’inventaire des sites fédéraux contaminés : celui-ci avoisine les 22 000, et « c’est sans compter les sites provinciaux, municipaux ou privés. On a beaucoup de travail à faire pour tout ça ».

Plus de 22 000 sites concernés

La pièce de théâtre ne se concentrera pas exclusivement sur la mine Giant. Une part significative de la recherche est en train d’être réalisée sur les cas des contaminations minières à Sudbury, en Ontario, et à Rouyn-Noranda, au Québec.


La récipiendaire du prix RBC mentionne aussi qu’il y a un aspect fascinant dans tout ça : les échelles. « Il y a l’échelle quantitative : quand on pense qu’une petite poussière de ce trioxyde de diarsenic peut tuer quelqu’un, alors qu’est-ce que c’est, 237 000 tonnes ? Je suis incapable d’imaginer », s’étonne-t-elle. « Il y a aussi l’échelle temporelle, ou le temps géologique, poursuit l’artiste. La région de Sudbury a été formée par une météorite il y a plusieurs milliers d’années. Quand on se met à réfléchir sur le temps qui est passé pour permettre à ces minéraux de se former et puis que nous, l’humanité, sommes arrivées comme un tout petit moment dans l’histoire de la planète Terre et en si peu de temps on a réussi à défaire toute sorte de liens minéraux faits au cours de milliards d’années. C’est quelque chose que j’ai du mal à saisir, et ça me fascine. »


Aucune date n’a encore été fixée pour la pièce. Les prochaines étapes sont dédiées à la composition du texte. À l’été prochain, l’artiste compte faire une séance de travail de quelques semaines avec plusieurs intervenants du projet : un concepteur sonore, un scénographe, un concepteur technique, et, entre autres, une conseillère dramaturgique. « Tout le monde va se rassembler pour mettre en place les premiers éléments fondateurs de la pièce qu’on va composer », assure la dramaturge.


Marie-Ève dévoile un avant-gout de ce qu’on peut attendre : « Pour l’instant, l’idée, c’est de créer une sorte de déambulatoire théâtral, c’est-à-dire que les spectateurs n’auront pas forcément des chaises ou des sièges et ils vont pouvoir se promener dans l’espace dans lequel il y aura des possibilités d’interaction, et peut-être des comédiens, des acteurs, des voix qui se déclenchent et qui racontent ces histoires. »

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